Perspectives

Journée De La CSU : Un Appel Stratégique À Investir Dans Les Soins De Santé Primaires Sur Le Continent Africain 

Écrit parJennifer Schechter Mai 27, 2024

Alors que le monde célèbre la Journée de la couverture sanitaire universelle (CSU), le 12 décembre, nous nous trouvons au milieu d’un paysage à la fois de progrès significatifs et de défis de taille en matière de santé mondiale. Les étapes récentes incluent l’engagement national du Kenya à étendre les programmes d’agents de santé communautaires professionnels, l’annonce du Fonds mondial d’augmenter les dépenses de santé communautaire à 900 millions de dollars et l’engagement de Gavi, l’Alliance mondiale du vaccin, en juin, à soutenir l’approche intégrée des soins primaires par Integrate Health et le Ministère de la Santé de Guinée. Ces développements offrent de l’espoir dans nos efforts continus.

Cependant, nous devons également faire face aux défis importants qui persistent, au premier rang desquels un déficit de financement annuel estimé à 4 milliards de dollars pour les services de santé communautaires. Dans ce contexte, la Journée de la CSU constitue un puissant rappel de notre nécessité de maintenir notre élan et de nous concentrer sur la mobilisation des financements nécessaires pour soutenir et accroître nos progrès vers la CSU. La voie à suivre pour parvenir à la CSU dans les pays africains consiste à augmenter les investissements globaux, tant de la part de la communauté internationale que des gouvernements nationaux, ainsi qu’à orienter ces investissements accrus vers les solutions les plus efficaces, celles qui offrent les plus grands retours et le plus grand impact sur l’amélioration des résultats en matière de santé. : investissements dans des systèmes intégrés de santé primaire et communautaire.

Soins de santé primaires : la clé pour atteindre les objectifs de la CSU

Le parcours vers la CSU en Afrique dépend essentiellement d’investissements ciblés dans les soins de santé primaires (SSP) et les systèmes de santé communautaires intégrés. En septembre dernier, les États membres des Nations Unies se sont réunis lors de l’Assemblée générale et ont approuvé la Déclaration politique de 2023 sur la CSU , qui reconnaît les SSP comme l’approche la plus efficace et la plus équitable pour atteindre la CSU et atteindre les objectifs de développement durable (ODD). Offrant des services complets sur tout le spectre des soins préventifs et curatifs, son efficacité économique est soulignée par  Financing Alliance for Health, qui estime un retour sur investissement dix fois supérieur à chaque dollar investi. Ce retour ne se manifeste pas seulement en termes monétaires, mais aussi par des améliorations tangibles de la santé, une réduction du fardeau des maladies et une amélioration de la qualité de vie, en particulier pour les personnes vivant dans des communautés isolées.

Les agents de santé communautaire (ASC) jouent un rôle crucial dans la prestation des soins de santé primaires, en particulier dans les régions où les infrastructures de santé sont limitées. Servant souvent de premier, et parfois d’unique, contact en matière de soins de santé dans leur communauté, les ASC fournissent des services essentiels allant des soins maternels et infantiles à la prévention et à la gestion des maladies. Cependant, il est essentiel de reconnaître que tous les programmes de santé communautaire ne sont pas aussi efficaces. Les investissements les plus efficaces sont réalisés dans les systèmes de santé communautaires intégrés. De tels systèmes garantissent que les ASC sont formés, équipés, supervisés, salariés et intégrés de manière transparente dans le cadre de soins de santé plus large, travaillant en coordination avec d’autres prestataires et établissements de soins de santé. Cette intégration, au cœur de la mission de Santé Intégrée, garantit l’efficacité des ASC dans l’amélioration de l’accès et de la qualité des soins.

L’agent de santé communautaire Mariam Lamboni lors d’une visite à domicile à Koutière, district de Dankpen

Ces programmes montrent comment des ASC bien soutenus peuvent améliorer l’accès et la qualité des soins de santé, en promouvant l’équité et en incarnant les principes de la CSU. Cependant, le succès de ces programmes est entravé par un financement insuffisant, comme le souligne le déficit de financement actuel de 4 milliards de dollars.

Voies pour combler le déficit d’investissement

Combler ce déficit de financement nécessite une approche globale et multipartite. 

Il est de plus en plus évident que les organisations bilatérales et multilatérales reconnaissent l’importance d’investir dans des systèmes de santé primaires et communautaires intégrés. Un nombre croissant d’organisations font des investissements intégrés une stratégie clé pour atteindre à la fois des objectifs verticaux axés sur les maladies, ainsi que des objectifs plus larges et nécessaires de renforcement des systèmes de santé. Il sera vital de continuer à tirer parti et à accroître cette aide publique au développement (APD) orientée vers des approches intégrées. Il existe un besoin urgent de continuer à faire évoluer les stratégies d’aide internationale des grandes organisations de financement bilatérales et multilatérales, en s’éloignant des fonds réservés pour investir dans des efforts globaux de santé communautaire. Cette évolution de l’APD contribuera plus efficacement à la construction de systèmes de santé résilients.

Les gouvernements nationaux ont également un rôle inestimable à jouer et doivent augmenter leurs dépenses de santé pour progresser vers les objectifs de la Déclaration d’Abuja. Le défi n’est pas seulement une question d’engagement, mais aussi de surmonter les obstacles systémiques. Les gouvernements des pays à revenu faible ou intermédiaire sont souvent confrontés à des priorités concurrentes et à un espace budgétaire limité, exacerbés par le fardeau de la dette et le manque de données pour prendre des décisions éclairées. Un plaidoyer mettant en avant les retours économiques de l’investissement dans les SSP est essentiel. Par exemple, le Consensus de Copenhague montre qu’un million de dollars investi dans la prévention du paludisme pourrait générer 10 milliards de dollars de bénéfices économiques grâce aux pertes de productivité évitées et aux dépenses de santé économisées. De même, le Consensus de Copenhague a révélé que 1,4 milliard de dollars consacrés à l’amélioration de la nutrition pourraient générer 19 milliards de dollars de bénéfices économiques grâce à une augmentation des revenus tout au long de la vie et à des économies de dépenses. Nous devons continuer d’accompagner et de doter les gouvernements nationaux des arguments de plaidoyer nécessaires pour accroître les investissements dans la santé et orienter ces précieuses ressources vers les solutions et les interventions qui produiront les plus grands retours sur la santé et la prospérité nationales. 

Le secteur privé recèle également un potentiel important pour investir dans la santé communautaire. Engager des entités privées par le biais de financements directs, de partenariats public privé et d’initiatives de responsabilité sociale des entreprises peut fournir de nouvelles sources d’investissement substantielles. Des modèles de financement innovants tels que les obligations à impact social, les micro prélèvements axés sur la santé et les obligations de la diaspora offrent des possibilités supplémentaires de lever des fonds pour la santé communautaire.

Au-delà du financement, l’implication des communautés elles-mêmes dans la prise de décision en matière de soins de santé et la mobilisation des ressources est cruciale. Au Togo, l’approche de Santé Intégrée comprend l’autonomisation des communautés locales à travers les Comités de Gestion Communautaire (ou COGES), qui sont des organes administratifs, financiers et opérationnels intégrés dans tous les établissements de santé. Ces comités jouent un rôle actif dans les décisions en matière de soins de santé, gèrent les ressources et veillent à ce que les services correspondent aux besoins de la communauté. Ce modèle favorise non seulement l’appropriation communautaire, mais améliore également la responsabilité et la durabilité de la prestation des services de santé. De telles approches communautaires de gestion des services de santé garantissent que les solutions sont adaptées, culturellement appropriées et durables.

Unis pour des communautés plus saines

Alors que nous célébrons aujourd’hui la Journée de la CSU, l’urgence de combler le déficit de financement des systèmes de santé communautaires intégrés constitue une étape cruciale vers la réalisation de la « Santé pour tous » en Afrique. Combler cet écart exige l’engagement des gouvernements, des donateurs internationaux, du secteur privé et des communautés elles-mêmes. En investissant dans les soins de santé primaires et en responsabilisant les ASC au sein des systèmes de santé intégrés, nous pouvons garantir l’accès de tous à des services de santé de qualité, faisant ainsi passer la CSU d’une aspiration à une réalité.

En cette Journée de la CSU, réaffirmons notre engagement à investir dans les solutions les plus efficaces et durables en matière de soins primaires, jetant ainsi les bases de communautés plus saines et plus résilientes dans les pays africains.