Les Agents de santé communautaires (ASC) jouent un rôle crucial dans la prestation des soins de santé, en tant que premier point de contact avec le système de santé. Dans les communautés reculées du Togo et de la Guinée où nous sommes actifs, assurer la continuité des soins fait souvent la différence entre la vie et la mort. C’est pourquoi nous nous engageons également à assurer le bien-être des Agents de santé communautaires que nous soutenons, en veillant à ce qu’ils parviennent à un bon équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée. Étant donné que la majorité de notre personnel est composée de femmes, nous accordons la priorité au soutien de leurs besoins spécifiques, en particulier lors d’événements majeurs de la vie tels que la maternité.
C’est le cas de N’danida N’danatche, agent de santé communautaire soutenu par Santé Intégrée dans la communauté de Kpindi, dans le district de Kozah. N’danida est devenue Agent de santé communautaire à l’âge de 23 ans et, depuis, elle sert inlassablement sa communauté en sensibilisant et en prodiguant des soins de santé aux femmes et aux enfants. Mais aujourd’hui, elle profite d’un repos bien mérité pour s’occuper de son nouveau-né et tisser des liens avec lui.
L’importance des Agents de santé communautaires salariés
En tant que salariées, les Agents de santé communautaires comme N’danida bénéficient d’un congé de maternité entièrement rémunéré de 14 semaines. Cette politique leur permet de disposer de suffisamment de temps pour récupérer après l’accouchement et pour se consacrer à leur nouveau-né et à la convalescence postnatale. Être parent est un défi et loin d’être un luxe, compte tenu des changements hormonaux, de la convalescence après l’accouchement et des nuits sans sommeil. Mais pour les Agents de santé communautaires qui transportent leur matériel sur des terrains difficiles, des politiques de congé tenant compte des spécificités de chaque sexe sont absolument essentielles.
« C’est agréable de pouvoir prendre le repos dont on a tant besoin. Je passe du temps avec ma famille et mes parents, et je m’accorde aussi du temps pour moi et mes loisirs », explique N’danida.
Dans le district de la Kozah où travaille N’danida, une quarantaine d’Agents de santé communautaires ont été embauchés à temps plein et jouent un rôle essentiel dans la fourniture de soins de santé primaires de qualité aux femmes et aux enfants de moins de cinq ans. Comme ils sont salariés, ils ont droit, selon la loi, à 30 jours de congés annuels et à 14 semaines de congés de maternité. Bien qu’il s’agisse d’une obligation légale liée à leur statut, tous les Agents de santé communautaires n’ont pas accès à ce droit. Women in Global Health estime que six millions de femmes travaillent sans être rémunérées ou sous-payées dans des fonctions essentielles du système de santé, une sous-estimation flagrante selon l’organisation, ce qui signifie qu’une grande partie de ce nombre comprend des agents de santé communautaire non rémunérés. En outre, l’Organisation internationale du travail estime qu’ une mère potentielle sur trois dans le monde ne bénéficie pas d’un congé suffisant pour se reposer et se remettre de l’accouchement. Pour nous, l’emploi d’Agents de santé communautaires salariés n’est pas seulement une question de salaire, c’est aussi une question de qualité de vie pour les femmes.
Maintenir la continuité de soins
Les avantages de ces politiques posent toutefois le problème du maintien de la continuité des soins. Les Agents de santé communautaires sont indispensables à leurs patients, car ils fournissent des services essentiels, parfois vitaux. Dans ces conditions, prendre un congé peut perturber les services vitaux qu’ils fournissent. C’est pourquoi Santé Intégrée recrute des Agents de santé communautaires de remplacement pour chaque district dans lequel nous travaillons.
Kéméalo Halotolou est l’un d’entre eux. Elle a remplacé N’danida pendant son congé de maternité. Chaque fois qu’un remplacement est envisagé, Kéméalo prend le temps de se familiariser avec la situation de chaque patient, afin d’assurer une transition en douceur. Elle a suivi N’danida pendant une semaine, d’abord pour se mettre au courant des dossiers en cours, ensuite pour se présenter aux patients et commencer à gagner leur confiance. Avec l’aide de l’application Tonoudayo, les transitions sont devenues plus faciles. Chaque tâche et chaque cas étant enregistrés, Kéméalo peut facilement poursuivre les soins et les traitements en cours. Elle a également rencontré le responsable du centre de santé local pour discuter de diverses priorités.
Kéméalo, qui a suivi la même formation que N’danida, fournit la même qualité de soins aux patients. Cependant, elle explique qu’elle a toujours du mal à gagner la confiance d’une communauté habituée à recevoir des soins d’une autre personne. « Instaurer la confiance prend du temps, mais c’est l’occasion de renforcer la confiance de la communauté dans notre système de santé », explique Mme Kéméalo. « Il s’agit de comprendre que le changement peut être difficile et prendre du temps. Une fois la confiance gagnée, on fait appel à moi pour toutes sortes de raisons. J’ai accepté ce poste parce que je veux servir ma communauté, alors je suis d’accord pour briser quelques barrières », ajoute-t-elle.
Grâce au professionnalisme et à la confiance de Kéméalo, N’danida a pu partir, rassurée de savoir que ses patients continueront à recevoir des soins de qualité sans interruption. Bien que ce système de remplacement nécessite des ressources supplémentaires, il offre une qualité de vie et une tranquillité d’esprit à toutes les personnes concernées.
Aller de l’avant avec engagement et attention
Les histoires de N’danida et de Kéméalo soulignent la valeur des Agents de santé communautaires soutenus et salariés. Notre décision d’allouer des ressources pour une rémunération équitable et des avantages sociaux essentiels, y compris le congé de maternité, découle d’un engagement envers nos employés et les communautés qu’ils servent. Adhérer à ce modèle implique de respecter des obligations légales et de faire face à des complexités bien plus importantes que si nous avions choisi d’employer des volontaires.
Pourtant, opter pour la voie la plus facile aurait signifié perpétuer les normes patriarcales, exploiter les femmes en laissant leur travail non rémunéré et non reconnu. Tout en reconnaissant que nous pouvons toujours faire mieux pour nos employées, nous refusons consciemment d’exacerber le double fardeau des soins non rémunérés et non reconnus pour les femmes qui sont l’épine dorsale de leurs systèmes de santé.